"J'étais sur la route toute la sainte journée"
- aphikit
- 5 mars 2018
- 5 min de lecture

Sans doute connaissez-vous cette chanson de Gérald de Palmas qui chante les désillusions d'un homme absent dont le couple s'effrite...
Mais là je vous propose la phrase au sens propre "j'ai été coincée sur la route toute la sainte journée" ! Pour un départ en vacances.
Revenons à la genèse : février, semaine aux sports d'hiver, route de montagne, Pyrénées. Vous voyez où je veux en venir : que du bonheur.
Et nous voilà donc partis, Grand Loulou, P'tit Loulou et moi sur la route du ski. Cinq grosses heures de route prévue, la pause pique-nique à midi et on prendra le goûter là-bas en regardant les sommets enneigés. La routine quoi, comme d'habitude. Hé bien croyez-moi, on les a bien regardés les sommets enneigés !
Départ matin, arrêt sandwiches sur une aire d'autoroute dans un froid qui vous gèle le bout des doigts, histoire de se mettre en conditions. Et parlons-en des conditions de route. Notre amie la radio 107.7 nous informe que sur notre route, il y a un ralentissement dans la montée vers le tunnel, celui qui nous permet d'éviter un col. Gros ralentissement et équipements spéciaux obligatoires. Aïe, ça se corse. Etonnant quand même, nous avions regardé la route au préalable et elle était indiquée comme dégagée. Admettons.
Grand Loulou, pris d'un doute affreux, attrape alors la boîte des chaînes qui reste à portée de mains lors du voyage vers la montagne. Il s'attelle à les essayer à la voiture, histoire de se faire la main. Que celui qui n'a jamais galéré sur une route de montagne pour mettre ses chaînes les doigts gourds de froid en jurant comme un charretier lui jette la première boule de neige !
La pause terminée, nous reprenons notre route en plaine, sans les chaînes je vous rassure. Et nous roulons joyeusement. Nous commençons à aborder la montée vers le tunnel, la fameuse et la route est parfaitement dégagée. Etrange que les infos aient été erronées à ce point.
A mi-chemin du tunnel, il y a du monde devant nous et ça ralentit, il est 14 heures. Nous roulons au pas et le temps passe. Les routes sont toujours bien nettes, pas de neige, c'est déjà ça. Vers 14 heures 30, nous sommes arrêtés. Nous ignorons pourquoi, la radio commence à grésiller car les ondes ont du mal à passer et P'tit Loulou commence à trouver le temps long. Vers 15 heures 30, déblocage soudain et inattendu. Nous gravissons plusieurs kilomètres en lacets ravis et soulagés. Pour nous immobiliser à nouveau. Il est désormais presque 16 heures (oui oui, l'heure où nous devions prendre le goûter bien installés au chaud en admirant la montagne).
Nous sommes bloqués sur une double voie avec parapet central (donc impossible de faire demi-tour et puis, pour aller où ?) avec des dizaines de voitures devant nous et encore bien plus derrière. Sur la route d'à-côté, celle qui descend, hé bien personne ne descend justement. Le soleil brille et chauffe la voiture. Tant mieux car nous avons tous arrêté nos moteurs. Les gens descendent de leurs véhicules, bavardent, fument, jouent et se dégourdissent les jambes. Et puis les gens commencent à parler et à se demander ce qui se passe, tandis que l'heure tourne et que le soleil baisse. Les rumeurs les plus folles commencent à circuler : le tunnel est fermé, on va passer la nuit ici.
Nous ne voyons personne d'autorité : ni gendarme, ni personnel de la DDE. De plus, et ce sont les inconvénients de la montagne : plus de réseau téléphonique et plus d'internet pour tenter de se renseigner, ni de radio évidemment. No man's land....
Là évidemment, comme on approche de 17h30, le soleil va passer derrière la montagne et cesser de vous réchauffer. La température extérieure va chuter (il fait à peine 0° déjà) et que vous allez devoir rallumer le moteur. Vous commencez à vous demander si vous n'allez vraiment pas passer la nuit sur-place sans RIEN SAVOIR. Donc vous calculez : on a une couverture, de l'eau et des aliments sucrés. Et un P'tit Loulou super sage qui prend son mal en patience mais qui en a quand même un peu marre.
Tiens, ça y est le soleil est passé derrière le sommet... En peu de temps, la température extérieure chute à -4°C, vous rajoutez une polaire à P'tit Loulou et son manteau. Puis vous rallumez le moteur.
A 18h15, tout redémarre, sans raison mais enfin on roule ! Il fait presque nuit, il nous reste plus d'une heure de route et il fait -6°.... Mais en revanche la route est sèche, parfaitement dégagée.
Je me demande s'il n'aurait pas été mieux de chaîner plutôt que d'attendre presque 4 heures arrêtés on ne sait pourquoi.
Les voitures commencent à descendre à nouveau en sens inverse et au rond-point suivant, une gendarme fait la circulation. Nous nous arrêtons et lui demandons ce qui se passe. Une avalanche a été déclenchée en amont, sur la route, pour sécuriser cette même route. Il fallait le temps à la DDE de la dégager, soit une heure environ.
Passablement agacés et le nerfs en pelote, nous expliquons que nous comprenons parfaitement cela : c'est même normal et justifié, ce sont les aléas de la montagne. Mais est-ce normal de nous laisser quasiment 4 heures sans qu'aucune voiture ne descende nous rassurer et nous expliquer la situation ?
C'est cela que nous trouvons inadmissible : le manque d'informations ! Nous aurions pris notre mal en patience sans nous inquiéter davantage.
La représentante de l'autorité, très gênée, nous concède qu'en effet ce n'est pas normal qu'aucune information ne nous ait été apportée.
Il faut savoir que la route avait été coupée bien trop tôt, que l'avalanche était prévue pour 16 heures et qu'elle n'a finalement été déclenchée qu'à 17 heures. Tout un concours de circonstances dont nous (et les centaines d'autres voitures) sommes les témoins et les victimes.
L'embouteillage formé derrière nous mettra encore de longues heures à se résorber (nous avions la "chance" de ne plus être très loin du tunnel).
Après l'avoir enfin traversé, nous continuons notre route jusqu'au village où se trouve la location. Il fait bien nuit, bien froid et nous roulons un peu plus d'une heure pour arriver au pied de la petite côte qui mène à notre havre de paix. Il est 20 heures, notre petite voiture gravit courageusement le rue gelée et enneigée avant de partir à reculons dans la pente. Ben non, elle ne peut pas monter la rue...Donc il faut chaîner, si si !
Et comme je vous le disais, on a beau s'être entraîné, quand il fait froid et nuit, et que vous venez de passer 9 heures en voiture, vous avez du mal à mettre ces chaînes sur vos pneus....
Chose péniblement faite, vous franchissez les derniers mètres qui vous séparent de but ultime de votre voyage, soulagés certes mais excédés. Vous émergez un peu sonnés de la courageuse voiture...
Ah, les joies de la montagne ! Allez, reprenons en choeur "J'étais sur la route toute la sainte journée..."
*Photographie issue de la République des Pyrénées (route des Pyrénées) février 2013
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